La culture en Bretagne, un bien commun créateur de lien et de sens – Proposition 3
- Poser à nouveau auprès de l’Union Européenne une candidature au label de « capitale européenne de la culture ». Cette candidature appuyée par la Région pourrait considérer que l’ensemble du territoire de Bretagne, riche de patrimoines matériels et immatériels, terre d’ouvertures et de partages, terre d’aujourd’hui et de demain, soit mis à contribution pour créer un réseau de recherches, de circulation d’œuvres, d’actes artistiques, de friches, d’expérimentations…
La mise en lumière permise par ce label pourrait être comprise non pas comme une année éphémère mais comme l’étincelle permettant de créer des synergies durables, de prendre appui sur ce qui aura été construit pour imaginer et développer l’avenir. Cela permettrait pour la Bretagne de créer les conditions d’un travail collaboratif, transversal, de réseau, de maillage de territoires à long terme.
Depuis la nuit des temps, la culture est un marqueur de l’identité et des spécificités de tout groupe humain. Elle existe dans les gestes du quotidien, se partage, se transmet et construit ainsi un héritage endémique de tout territoire de vie.
La Bretagne s’inscrit dans cette réalité.
En revanche, ce qui fait certainement de la Bretagne une culture à part est qu’elle est connue et reconnue pour porter une identité si forte qu’être breton prend un sens intime chez tout individu et cela bien au-delà du territoire breton.
Cette identité ou fierté bretonne n’est pas le fruit du hasard. Elle est la part consciente et inconsciente de la façon dont se vit le quotidien : la Bretagne est une terre de partage, de solidarité, de tolérance, de coopération, de transmission et de capacité à rebondir quels que soient les obstacles rencontrés.
Notre façon de vivre est particulièrement imprégnée des valeurs communes qui structurent notre région.
Réagir, ensemble
Aujourd’hui, face aux maux du monde qui ébranlent sa solidité et sa capacité à inventer son futur, il est temps de réagir.
Nous sommes des femmes, des hommes convaincus qu’il est nécessaire de considérer la culture comme un levier essentiel à toute action politique, sociale, éducative, économique, environnementale, territoriale, etc.
Par mimétisme national ou par le truchement d’années d’exercice d’une certaine forme de culture, il est possible que nous nous soyons collectivement éloignés du véritable rôle de la culture au sein de la société ; ainsi que des multiples endroits où elle existe dans le quotidien de chacun.
Il nous parait aujourd’hui indispensable d’amener les différentes acteurs – publics et privés, amateurs et professionnels, citoyens de tous les territoires – à faire culture ensemble.
Nous souhaitons les inviter à faire sens, à créer et développer les liens humains, sociaux, économiques…, à travailler le pluriel tout en laissant place au singulier ; à permettre les laboratoires, le droit à l’expérimentation, le droit à l’erreur ; à bousculer les concepts, l’existant ; et à être plus actifs et partie prenante des processus de décision, avec la volonté d’aller du collectif à l’individuel et de l’individuel au collectif.
Le Breizh Lab porte comme idée de la culture en Bretagne celle d’une irrigation citoyenne par la création, par les artistes, par l’ensemble des acteurs culturels en tout point du territoire.
La culture en Bretagne doit être capable de créer des ponts pour que les ruisseaux, les rivières, les fleuves puissent couler librement.
La culture doit être un vecteur de lutte contre l’exclusion identitaire, l’exclusion territoriale, pour que chacun puisse se dire de sa commune, de la Bretagne autant qu’européen, français et citoyen du monde.
Que chacun puisse se dire de quelque part, au sein d’un “je” ou d’un “nous” de façon ouverte et universelle.
Semer dans et hors les murs pour retisser nos liens.
Nous considérons que la culture en Bretagne doit se penser à la manière d’un rhizome végétal, structure évoluant en permanence, dans toutes les directions horizontales, et dénuée de niveaux, modèle où chaque élément apporte au tout autant qu’il s’en nourrit.
Indépendamment de sa taille, de sa forme ou de sa localisation, comme autant d’éléments nécessaires à un biotope vivant, la liste ci-dessous constitue un semis favorable à la réinvention d’une culture forte et ravivée en Bretagne :
- redonner à chacun une dignité, une fierté d’être, un droit à affirmer sa pensée ;
- tisser des liens au plus proche, ramifier, connaître et reconnaître la part de culture de chacun ;
- respecter, entendre, retravailler un réseau de nouvelles solidarités ;
- développer la parole de tout un chacun pour permettre d’inventer un chemin commun ;
- ouvrir des récits de territoires pour l’échange, le dialogue, le partage et la création ;
- construire à partir de récits individuels un récit collectif ;
- remettre en culture les zones de croisement entre le regard de la jeunesse et l’expérience des aînés ;
- recréer du lien entre culture, éducation populaire, et action sociale ;
- s’appuyer sur le creuset d’expériences et la richesse de la diversité que constitue l’Europe et au-delà ;
- questionner et inventer la place et le rôle de l’artiste dans la cité et dans le territoire ;
- mettre en lumière la part de culture propre à chacun au sens des savoir-faire et des pratiques du quotidien ;
- consolider la tradition de transmission en innovant dans les modèles éducatifs ;
- ensemencer la culture à l’échelle des villages et des quartiers pour permettre nombre d’expériences locales de s’épanouir ;
- outiller à nouveau notre territoire de conteurs, d’auteurs, de cinéastes, de troupes, de musiciens, d’artistes de toutes disciplines comme autant de bataillons propres à ré-enchanter et inventer un nouvel humanisme ;
- instaurer un dialogue entre les mondes de la culture et de l’économie comme acte essentiel à même de développer des projets pertinents dépassant le seul lien à la défiscalisation ;
- porter le lien entre science, technologie et culture pour inventer des nouveaux espaces de production de sens ;
- connaître et faire connaître ce qui fait la richesse de la Bretagne :
- terre de festivals dont les modèles économiques sont aujourd’hui parfois à questionner ;
- terre de créations mais dont la diffusion faute d’appui suffisant est parfois limitée ;
- terre d’artistes dans toutes les disciplines et dans toutes ses composantes ;
- terre de patrimoine à se réapproprier ;
- terre de tradition mais aussi d’ouvertures, de rencontres et d’accueil, de modernité, d’innovation, d’imaginaire !
Au travers de l’ensemble de ces thématiques il nous paraît essentiel que la culture ne soit pas un chapitre à part dans une politique publique. Elle doit exister dans tout projet de la Région Bretagne. La culture doit être le prisme, comme l’accompagnement des transitions, conditionnant l’accompagnement de toute action publique quelle qu’en soit la nature, sur l’ensemble du territoire.
Cette posture nouvelle permettra demain à la culture de jouer pleinement son rôle : celui de permettre à chacun de trouver des repères collectifs, un moyen de se dire au monde en mouvement, une nécessité de trouver une signification et une direction commune, un nouveau sens à ce qui fait que nous nous sentons d’une Bretagne à la fois ancrée et ouverte au monde.
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